À travers deux récits parallèles, l'histoire raconte l'accident tragique de deux adolescents de 15 ans, Marius et Léon. L'un se fait happer par une bombe, à Paris, l'autre tombe dans un profond coma suite à une intoxication alimentaire. L'accent dans les premières pages est mis sur leur jeune âge et leur insouciance, puis on bascule vers le point de vue des parents au moment du drame, avec à chaque fois l'attente, l'angoisse, le doute, la prise de conscience, la culpabilité, la colère, puis l'acceptation. L'un s'en sort tandis que l'autre s'éteint, car Léon n'aurait pas pu survivre sans le don d'organe de Marius.
Véritable Réparer les vivants pour adolescents, ce livre est une magnifique histoire permettant d'aborder des sujets aussi terribles et sensibles que le don d'organe ou le deuil. Sans être naïf, le style engloutit le jeune lecteur dans une histoire qui, racontée à hauteur d'adolescent, pourrait être la sienne. La métaphore filée de la bombe, tout au long du livre, lui donne le rythme et l'intensité d'un compte à rebours, transformant une nouvelle simple et efficace en ce qui pourrait devenir un futur classique de la littérature jeunesse.
Avant, son père la prenait sur ses genoux, la faisait jouer, rire. Il l'aimait. C'était naturel, c'était doux. Mais un jour qu'elle pose une question si banale, pas même fruit de sa curiosité, mais utile à la réalisation d'un devoir d'école, Céleste découvre l'effrayante violence qui brûle en son père. La question - « c'est quoi ton métier ? » - a levé le voile sur une rancoeur et un désenchantement du monde extérieur, celui des adultes. Ce jour-là, son père s'énerve, hurle, ricane : « Mon métier ? Je vais te montrer... » La brutalité avec laquelle il lui prend le bras surprend, elle ne sait pas encore que c'est dès lors la nouvelle norme. Il la traine, l'entraine dans sa voiture et ils roulent vers son lieu de travail : un cimetière. Son père est fossoyeur. Devant les tombes qui s'étendent à ses pieds, Céleste ne saisit pas tout de suite que sa vie a changé.
Dès lors, la brutalité s'introduit chez eux, vu à travers les yeux de Céleste, témoin soir après soir des scènes où le père maltraite sa mère, toujours prêt à cogner.
Leur vie est maintenant accompagnée « d'une invitée à la robe sombre, au cou dégagé, aux formes harmonieuses », la bouteille. Céleste et sa mère s'enfoncent dans la peur, et la famille sombre, jusqu'à ce que les services sociaux interviennent. La jeune fille doit quitter sa mère et sa maison, libérée des griffes de son père.
À l'abri dans un foyer pour enfants, témoin du malheur d'autres qui lui ressemblent, elle s'étonne de s'y plaire, de ne pas fuire la compagnie de ces autres. Elle apprend à s'exprimer, à choisir le rouge, pour montrer sa colère, à sculpter, pour réapprendre à ne plus être elle-même statue. Le récit est entrecoupé de retours dans le passé, au fil desquels le lecteur peut, petit à petit, reconstituer l'histoire de Céleste. Puis, derrière celle de la victime, celle du monstre, du dragon, du bourreau. Celle du père qui dissimule, lui aussi, le passé d'un enfant maltraité. Un roman émouvant, mais plein d'espoir, véritable force de vie : une aide précieuse pour tout adolescent en quête de réponses.