Bien avant de devenir célèbre avec la publication de Sur la route, avant même de publier The Town and the City (qui allait être son premier roman officiel), Jack Kerouac était marin. L'Océan est mon frère, resté jusqu'ici inédit, est le fruit de cette histoire d'amour avec l'océan. C'est le récit des aventures et fortunes diverses de Wesley Martin, marin solitaire et taciturne, qui voue à l'océan « un amour unique et étrange », et de Bill Everhart, intellectuel passionné, à la recherche d'une vie simple et d'une liberté fondamentale.
Deux des facettes de la personnalité complexe de Jack Kerouac.
Décidant sur un coup de tête de s'embarquer sur un navire marchand, ils se retrouvent à bord du S.S. Westminster en partance de Boston. En route pour le Groenland, ils conversent de tout, boivent du whisky, jouent aux cartes, évitent de justesse les torpilles allemandes, se plongent dans la contemplation de la vaste solitude qui les entoure, s'interrogent sur leur destination et la possibilité de l'atteindre. Kerouac tisse les fils de cette intense histoire de marins en temps de guerre pour en faire un portrait épique de l'amitié et de la fraternité, pour engager une méditation sur les moyens d'échapper à l'emprise grandissante de la société et, surtout, sur la puissance indomptable, sauvage, de l'océan.
La lettre écarlate, c'est la marque au fer rouge qui désigne la femme adultère dans l'amérique du puritanisme obsessionnel de l'époque coloniale.
Trois personnages : hester qui vit avec une dignité admirable sa faute et sa solitude. arthur dimmesdale, le jeune pasteur dont les élans mystiques soulèvent à boston l'enthousiasme des fidèles mais qui, ensorcelé par hester, ne parvient ni à dominer ni à vivre sa sensualité. chillingworth, le mari, qui pendant des années tourmentera en silence le pasteur jusqu'à la folie et la mort. le premier des grands romans américains, la clef d'une sensibilité nationale toujours partagée entre la tentation du scandale et le démon de la culpabilité.
« En ma qualité d'Autrichien, de Juif, d'écrivain, d'humaniste et de pacifiste, je me suis toujours trouvé présent là où les secousses sismiques se produisent avec le plus de violences (...) Né en 1881 dans un grand et puissant empire (...), il m'a fallu le quitter comme un criminel. Mon oeuvre littéraire, dans sa langue originale, a été réduite en cendres. Étranger partout, l'Europe est perdue pour moi... J'ai été le témoin de la plus effroyable défaite de la raison (...). Cette pestilence des pestilences, le nationalisme, a empoisonné la fleur de notre culture européenne.».
Lorsque, en 1941, réfugié au Brésil, Stefan Zweig rédige Le monde d'hier, il a déjà décidé de mettre fin à ses jours. « Parlez, ô vous, mes souvenirs et rendez au moins un reflet de ma vie avant qu'elle ne sombre dans les ténèbres.».
Chroniqueur de l'«Âge d'or» de l'Europe, il évoque avec bonheur sa vie de bourgeois privilégié, celle de ceux qui furent ses amis: Arthur Schnitzler, Hugo von Hofmannsthal, Rainer Maria Rilke, Romain Rolland, Paul Valéry... Mais, analyste de l'échec d'une civilisation, il s'accuse d'avoir, peu soucieux des réalités sociales et économiques, assisté, aveugle, à la montée des périls.
Le monde d'hier: le chef-d'oeuvre de Stefan Zweig et l'un des plus grands livres-témoignages de notre époque.
Ami de Freud, d'Arthur Schnitzler et Richard Strauss Stefan Zweig (Vienne 1881- Petropolis 1942) fit partie de la fine fleur de l'intelligentsia juive de la capitale autrichienne avant de quitter son pays natal en 1934 sous la pression fasciste. Réfugié à Londres il y poursuit une oeuvre de biographe (Fouché, Marie Antoinette, Marie Stuart) et surtout d'auteur de romans et nouvelles qui ont conservé leur attrait près d'un siècle plus tard (Amok, La pitié dangereuse, La confusion des sentiments). C'est au Brésil qu'il se suicide en 1942, au lendemain du jour où il avai expédié le manuscrit du Monde d'hier à son éditeur.
Les Métamorphoses d'Ovide (43 av. J.-C.-17 ap.) sont pour la poésie latine une sorte de livre des records, de longueur (11995 vers évoquant ou narrant 250 métamorphoses en quelque 150 épisodes), mais aussi de variété des genres, des styles et des procédés narratifs. Couvrant toute l'histoire du monde, du chaos originel au temps d'Auguste où écrit le poète, sorte d'oeuvre-univers dont la structure labyrinthique fait un véritable et fascinant palais des mirages, "Légende dorée" ou "Vatican du paganisme", "Mille et une nuits de l'Antiquité" elles s'ouvrent sur un récit de la Genèse et s'achèvent, après un long et passionnant prêche philosophique prononcé par Pythagore (569-475 av. J.-C.), sur la promesse de divinisation de l'empereur régnant et d'immortalité du poète, après avoir offert au lecteur, sans jamais l'ennuyer, une profusion de récits épiques et de contes burlesques, édifiants, émouvants ou galants dont la postérité n'a cessé de recycler les inépuisables joyaux.
Olivier Sers a traduit Ovide, entreprise sans précédent, vers pour vers, en 11995 alexandrins classiques restituant fidèlement le phrasé et la frappe poétique des hexamètres latins. Pour la première fois le lecteur moderne des Métamorphoses est placé dans la situation même du lecteur antique.
Trouver les endroits les plus propices à la rencontre, feindre la passion, accentuer ses talents, conquérir mais aussi conserver, L'Art d'aimer est un véritable traité de la galanterie et de la stratégie amoureuse : écrit en 43 avant J.-C., il offre un tableau saisissant des moeurs romaines sous Auguste. C'est également pour Ovide l'occasion de scruter, en grand moraliste, les facettes de l'âme humaine.
Dans ce chef-d'oeuvre de la poésie épique sanskrite, Kalidasa raconte en 19 chants l'histoire de la dynastie mythologique des Fils du Soleil. Le poème est centré sur la figure de Rama, incarnation de Vishnu dans cette prestigieuse lignée. Les neuf premiers chants sont consacrés aux quatre prédécesseurs de Rama, de pieux rois dont les dieux mettent la vertu à l'épreuve par de subtiles malédictions et de terrifiants assauts. Dans les six chants suivants, l'auteur narre sa version du Ramayana. Il sélectionne dans la célèbre épopée de Valmiki les passages les plus propices à de somptueux développements lyriques :
La naissance miraculeuse de Rama, son union avec Sita, l'enlèvement de celle-ci par Ravana ou encore sa répudiation exigée par les sujets du royaume. Le poème évoque ensuite les descendants de Rama et s'achève par la montée sur le trône d'une reine qui assurera la régence jusqu'à la naissance de son fils.
Notre langage est devenu faible, accablé de néologismes et rongé par l'à-peu-près. En un mot : pauvre.
Notre langage va mal. Ainsi le monde que nous déchiffrons.
Comment sortir du chaos de l'approximation ?
Comment nous réapproprier nos mots ?
Songez que la plus simple marguerite contient en elle une perle, un rayon de lune et l'histoire d'un amour rarissime ; ou que le secret des confins, inaccessibles et inquiétants, est en réalité d'accueillir l'autre avec confiance.
Avec 99 mots, Andrea Marcolongo dessine un atlas étymologique et nous montre comment et pourquoi l'histoire de ces mots est une boussole précieuse pour qui voudra bien s'en munir.
Et si notre instinct de la langue et l'amour des étymologies donnaient le pouvoir de changer le monde ?
Sans doute achevée vers 913, cette anthologie rassemble mille cent onze poèmes, presque tous des tanka (poèmes de 31 syllabes), représentant un siècle et demi de création poétique. Le Kokin waka shû marqua de manière définitive - et jusqu'à nos jours - la sensibilité et la perception de la nature des Japonais ; son influence sur la littérature postérieure - prose et poésie - est considérable. Il s'agit de sa première traduction intégrale en français.
« ARRIVER LÀ-HAUT un matin d'été après que, la nuit, un orage a lavé le ciel et la terre, s'arrêter en silence pour regarder, et demeurer sous le charme parce que la beauté est telle que le regard ne sait où se poser, et on en a le souffle coupé. Rester ici jusqu'au couchant à écouter en silence la montagne raconter des légendes, des histoires de bergers, d'alpinistes, de guerre. »
Deux reporters de guerre vétérans. Le caméraman veut au péril de sa vie filmer le moment où le pont de Bijelo Polje, piégé par les Croates pour empêcher l'armée musulmane de traverser la Neretva, volera en éclats. Entre-temps, l'un et l'autre, exposés aux balles et aux obus, sont hantés par les souvenirs d'autres risques courus naguère, au Salvador, au Liban et ailleurs. Ainsi surgissent les figures de correspondants de toute origine, portraits qui dévoilent, avec quelques rares élans d'un héroïsme discutable et d'une humanité poignante, toute l'éthique douteuse de ces hommes et de ces femmes prêts à donner leur vie pour leur seule cause : la reconnaissance, la célébrité, l'argent.
Les deux fils d'oedipe, Etéocle et Polynice, se sont entre-tués au combat. Leur oncle Créon, le roi de Thèbes, décide que le cadavre de Polynice - qui a trahi sa patrie - demeurera exposé sans sépulture. La jeune Antigone, sa soeur, viole volontairement le décret : elle est arrêtée, et récidive. Pour elle, les lois immuables de la conscience, les "lois non écrites", se situent au-dessus des décrets des hommes. Antigone est celle qui désobéit, celle qui dit non, celle qui va au-devant de la mort.
« L´épopée virgilienne n´est jamais languissante, elle a de la fluidité et du rythme ; avant même de saisir la beauté d´ensemble de l´oeuvre, nous percevons tout de suite, ligne à ligne, que l´écriture de l´Énéide est une des plus limpides et raffinées qui soit, semée de vers dont la pureté, l´opalescence et l´émotion donnent le frisson ».
Paul Veyne
Et venir & être avec moi quelque part, ne serait-ce pour je ne sais combien de temps.
S'il te plaît, Caitlin, ma chère.
Dylan Thomas « Ces mots ne sont pas les mots qui expriment ce que je veux exprimer, mais ce sont les seuls que je trouve qui disent la moitié de ce que je veux exprimer. Et ça ne va pas. Je ne suis qu'un grotesque usager des mots, pas un poète. Voilà la vérité. Inutile de s'apitoyer sur moi. » Dylan Thomas (1914-1953), Lettre à Pamela Johnson, 8 mai 1934.
À NOTRE-DAME DE PARIS EN RECONNAISSANCE DES GRÂCES ACCORDÉES Hope Mirrlees « Suis à moitié aveugle d'avoir écrit des notices et fait des corrections dans cent soixante exemplaires de Paris, a poem. » Virginia Woolf, Journal, traduction Marie-Colette Huet, 1987.
Une déambulation fascinante dans Paris qui renaît en 1919, sous la plume d'une jeune poète avant-gardiste.
« Tout objet de beauté est une joie éternelle :
Le charme en croît sans cesse ;
Jamais Il ne glissera dans le néant, mais il gardera toujours Pour nous une paisible retraite, un sommeil Habité de doux songes, plein de santé, et qui paisiblement respire.
Aussi, chaque matin, tressonsnous Des guirlandes de fleurs pour mieux nous lier à la terre, Malgré les désespoirs et la cruelle disette De nobles natures, malgré les sombres journées Et tous les sentiers malsains et enténébrés Ouverts à notre quête ; oui, malgré tout cela, Une forme de beauté écarte le suaire De nos âmes endeuillées. Tels sont le soleil, la lune, Les arbres vieux ou jeunes qui offrent le bienfait de leurs printaniers ombrages Aux humbles brebis ; tels sont encore les narcisses Et le monde verdoyant où ils se logent, les ruisseaux limpides Qui se bâtissent un frais couvert En vue de l'ardente saison, le taillis au fond des bois, Richement parsemé de la splendeur des roses musquées ;
Telle, aussi, la magnificence des hautes destinées Que nous avons rêvées pour les plus grands des morts ;
Tels, encore, tous les contes charmants lus ou entendus, Fontaine intarissable d'un breuvage immortel Qui s'épanche en nos coeurs du bord même des cieux.
Et ce n'est pas seulement pendant une heure brève Que nous pénètrent ces essences ; non, comme les arbres Qui chuchotent autour du temple sont bientôt devenus Aussi précieux que le temple lui-même ; ainsi, la lune, La poésie - cette passion - merveilles infinies, Nous hantent jusqu'à devenir le réconfortant flambeau De nos âmes et s'attacher à nous d'un lien si étroit Que, dans le plein soleil comme sous un ciel couvert et sombre, Il nous les faut toujours à nos côtés, ou c'est la mort. » Endymion, livre I, 1-33 (Avril-décembre 1817.)
Nous avons tissé une toile à l'enfance.
Une toile aérienne et ensoleillée.
Et dans la prime enfance détecté une source.
D'eau fraîche et non souillée.
Charlotte Brontë.
Tout le monde connaît les soeurs Brontë :
Charlotte, Emily et Anne.
Mais le frère, Branwell ?
Et leur enfance dissimulée à inventer des mondes et des langages ?
À travers poèmes et proses inédits, ce recueil reconstruit le cheminement imaginaire - « le monde du dessous », écrivait Charlotte - au coeur de la création romanesque des Brontë et lui donne tout son sens.
À la guerre, remarque Mario Rigoni Stern, on peut mourir à vingt ans, en une seconde, sur l'herbe, en plein printemps. Aucune polémique, aucun pathos, aucun héros dans le récit de cette guerre qui emmena Mario Rigoni Stern en France et en Albanie de 1940 à 1941, rien que la réalité. Tourmenté par les souvenirs et par les poux, Rigoni Stern traverse cette épreuve en moraliste pacifique. « Pour la plupart d'entre nous commença la fin de tout. »
Jubilant dans le baroque aux confins de l'érotisme, du fantastique et de la mort, Les Métamorphoses d'Apulée (IIe siècle), seul roman latin dont nous possédions le texte intégral, racontent à la première personne les tribulations d'un naïf trop curieux qu'une opération de sorcellerie ratée a transformé en âne mais qui n'en pense pas moins, et tissent dans tous les styles la trame parodique d'une comédie humaine dont le dénouement est procuré par l'intervention d'Isis-Reine, Déesse Éminentissime. "Ce livre est un chef-d'oeuvre. Il me donne à moi des vertiges et des éblouissements ; la nature pour elle-même, le paysage, le côté purement pittoresque des choses sont traités là à la moderne et avec un souffle antique et chrétien tout ensemble qui passe au milieu. ça sent l'encens et l'urine, la bestialité s'y marie au mysticisme, nous sommes bien loin encore de ça nous autres comme faisandage moral." (Gustave Flaubert, 1852)
Auteur favori aux Enfers ? Commence une quête qui va confronter le dieu fantasque aux dures réalités du monde des ombres : des grenouilles qui le célèbrent dans un grotesque chant moderniste, un monstre puant, des coups. L'art ne sert alors à rien.
Chez les morts, Dionysos doit arbitrer un conflit entre Eschyle et Euripide. Aristophane offre aux spectateurs un concours tragique qui n'a jamais eu lieu, puisque Euripide a commencé sa carrière juste après la mort d'Eschyle. Le combat analyse des poétiques opposées et montre leurs ridicules : l'art sublime d'Eschyle, qui produit de la réalité grandiose, mais abrutit les spectateurs; ou au contraire l'art d'Euripide, qui prétend enseigner le langage et la dialectique aux Athéniens, mais qui, trop subtil, les rend inefficaces et fourbes.
Dionysos choisit Eschyle : Athènes, tout près d'être défaite dans sa guerre avec Sparte (hiver 405), a besoin d'un auteur qui rappelle un âge ancien et meilleur. Le vieil Eschyle remonté sur terre servira à dénoncer le présent. C'est la comédie qui décide, souverainement, de ce que vaut la tragédie et des besoins politiques de la cité.