Première édition critique de l'ecume des jours établie par gilbert pestureau et michel rybalka, avec deux préfaces, le texte définitif revu sur manuscrit, une chronologie, une note sur l'édition 1994, une note sur la composition de l'oeuvre, des notes et variantes, un glossaire et une bibliographie détaillée des éditions de l'ecume des jours.
" le 124 était habité de malveillance.
Imprégné de la malédiction d'un bébé. " a bluestone road, près de cincinnati, vers 1870, les meubles volent, la lumière allume au sol des flasques de sang, des gâteaux sortent du four marqués de l'empreinte d'une petite main de bébé. dix-huit ans après son acte de violence et d'amour maternel, sethe l'ancienne esclave et les siens sont encore hantés par la petite fille de deux ans qu'elle a égorgée.
Jusqu'au jour oú une inconnue, beloved, arrivée mystérieusement au 124, donne enfin à cette mère hors-la-loi la possibilité d'exorciser son passé. parce que pour ceux qui ont tout perdu, la rédemption ne vient pas du souvenir, mais de l'oubli.
Ce roman aux résonances de tragédie grecque, au style d'une flamboyante beauté lyrique, a reçu en 1988 le prix pulitzer, et a figuré pendant des mois en tête des listes de best-sellers en grande-bretagne et aux etats-unis.
C'est un été en Normandie. Le narrateur est encore dans cet état de l'enfance où tout se vit intensément, où l'on ne sait pas très bien qui l'on est ni où commence son corps, où une invasion de fourmis équivaut à la déclaration d'une guerre qu'il faudra mener de toutes ses forces. Un jour, il rencontre un autre garçon sur la plage, Baptiste. Se noue entre eux une amitié d'autant plus forte qu'elle se fonde sur un déséquilibre : la famille de Baptiste est l'image d'un bonheur que le narrateur cherche partout, mais qui se refuse à lui.
Écrit dans une langue ciselée et très sensible, Un jour ce sera vide est un roman fait de silences et de scènes lumineuses qu'on quitte avec la mélancolie des fins de vacances. L'auteur y explore les méandres des sentiments et le poids des traumatismes de l'Histoire.
Travailleuse sociale à la vie tourmentée, Dalva a affronté, à quarante-cinq ans, son lot de souffrances et de deuils.
Partie se ressourcer dans le ranch familial du Nebraska, elle se plonge dans les archives de son aïeul missionnaire et se souvient de tout : le décès de son père pendant la guerre de Corée, son grand amour Duane écarté par sa famille, le bébé qui lui a été enlevé adolescente, la mort de son grand-père si cher, l'histoire tortueuse de sa lignée intimement liée aux Sioux...
Dans ce magnifique roman choral, Jim Harrison entrelace la voix de Dalva, les carnets de son arrière-grand-père et le récit de son amant, historien. Il dépeint une héroïne meurtrie, mais d'une force et une liberté incomparables. À travers cinq générations de sa famille de pionniers, c'est le mythe du jardin d'Eden et de l'innocence perdue qu'il met en scène avec ce sens de l'espace, cet extraordinaire lyrisme, cette violence qui lui sont propres. Et, autour de Dalva, il raconte bien sûr l'Amérique - du génocide de la nation indienne aux séquelles de la guerre du Vietnam, des grands espaces aux cyniques années quatre-vingts.
Grande fresque historique, magnifique portrait de femme, Dalva est sans doute le chef-d'oeuvre de Jim Harrison.
L'histoire se déroule dans l'Amérique des années 1950, encore frappée par la ségrégation. Dans une Amérique où le « White only » ne s'applique pas qu'aux restaurants ou aux toilettes, mais à la musique, au cinéma, à la culture populaire. L'Amérique de Home est au bord de l'implosion et bouillonne, mais c'est ici la violence contre les Noirs américains, contre les femmes qui s'exprime. Les grands changements amorcés par le rejet du Maccarthisme, par la Fureur de vivre ou le déhanché d'Elvis n'ont pas encore commencés. En effet, les Noirs Américains sont brimés et subissent chaque jour le racisme et la violence institutionnalisés par les lois Jim Crow, qui distinguent les citoyens selon leur appartenance « raciale ». Pour eux, le moindre déplacement, même le plus simple, d'un état à l'autre, devient une véritable mission impossible. En réponse à cette oppression, l'entraide et le partage ? facilités par l'utilisation du Negro Motorist Green Book de Victor H. Green qui répertorie les restaurants et hôtels accueillant les noirs dans différents états ? sont au coeur des relations de cette communauté noire dans une Amérique à la veille de la lutte pour les droits civiques.
La guerre de Corée vient à peine de se terminer, et le jeune soldat Frank Money rentre aux Etats-Unis, traumatisé, en proie à une rage terrible qui s'exprime aussi bien physiquement que par des crises d'angoisse. Il est incapable de maintenir une quelconque relation avec sa fiancée rencontrée à son retour du front et un appel au secours de sa jeune soeur va le lancer sur les routes américaines pour une traversée transatlantique de Seattle à Atlanta, dans sa Géorgie natale. Il doit absolument rejoindre Atlanta et retrouver sa soeur, très gravement malade. Il va tout mettre en oeuvre pour la ramener dans la petite ville de Lotus, où ils ont passé leur enfance. Lieu tout autant fantasmé que détesté, Lotus cristallise les démons de Frank, de sa famille. Un rapport de haine et d'amour, de rancoeur pour cette ville qu'il a toujours voulu quitter et où il doit revenir. Ce voyage à travers les États-Unis pousse Frank Money à se replonger dans les souvenirs de son enfance et dans le traumatisme de la guerre ; plus il se rapproche de son but, plus il (re)découvre qui il est, mieux il apprend à laisser derrière lui les horreurs de la guerre afin de se reconstruire et d'aider sa soeur à faire de même.
Home est le dixième roman de Toni Morrison. À travers l'histoire dure et torturée de ce jeune soldat, c'est un roman de la rédemption que nous offre ici l'auteur. Ce retour à l'Amérique du XX e siècle, avec une focalisation sur les années 1950, est un développement nouveau dans l'oeuvre de Toni Morrison, mais on retrouve pourtant les thèmes qui caractérisent son oeuvre. Elle laisse le lecteur découvrir ces années 1950 qui ne sont finalement que suggérées qu'à travers de petits indices. Elle laisse le souvenir de cette époque se reconstruire à travers les images distillées dans notre inconscient collectif. C'est encore et toujours dans la suggestion que l'art de Toni Morrison se révèle. Elle réussit à faire d'un roman finalement assez court une véritable oeuvre tout en subtilité, en vérités voilées qui se glissent progressivement jusqu'au lecteur avant d'exploser au grand jour.
Blond, grand, attirant, Lee Anderson a tout du canon de beauté de l'Américain blanc. Mais il cache en réalité un secret : il a du sang noir. Un sang noir qui a coûté la vie à son frère, victime d'un crime raciste. Aujourd'hui, Lee Anderson est décidé à faire expier ce drame à la société blanche tout entière. En s'installant dans la bourgade de Buckton, il en est persuadé : il se fera justice avec violence.
Publié en 1946, J'irai cracher sur vos tombes fut aussitôt jugé pornographique, obscène, dérangeant, et son auteur fut voué aux gémonies. Enrichie de photographies inédites du manuscrit de l'adaptation cinématographique du roman, cette nouvelle édition présente, en outre, l'imposant Dossier de l'« Affaire J'irai cracher sur vos tombes » par Noël Arnaud, où le lecteur découvrira le destin passionnant d'un texte aux multiples scandales et à la force toujours intacte.
Au cours des vingt-cinq chapitres que compte le roman - correspondant aux 25 années de prison encourues par les criminels -, cinq narrateurs prennent tour à tour la parole :
Un avocat et son frère, un herboriste, deux collecteurs de créances. Ces cinq hommes sont liés par un pacte criminel :
Tous ont pris part au kidnapping et à l'assassinat d'un chef d'entreprise fortuné, dont ils ont dissous le corps dans de l'acide sulfurique, espérant que leur forfait reste impuni (« pas de corps, pas de crime »). Quand ils prennent la parole, chacun des protagonistes évoque le déroulement des faits, mais multiplie également les digressions sur ses états d'âme, les mille et une misères de l'existence, sa famille, ses souvenirs d'enfance, ses obsessions...
António Lobo Antunes nous fait pénétrer dans la maison, l'enfance, le corps, la routine des autres, à travers sa langue éminemment personnelle, puissamment brassée, qui fait résonner les voix entremêlées des vivants et des morts. En nous ouvrant les portes des esprits de ces cinq personnages criminels, António Lobo Antunes nous dépeint une comédie humaine allant du plus sensible au plus grotesque.
Dans ce recueil d'une quarantaine de textes écrits au cours des dernières décennies, Toni Morrison aborde de multiples questions tant politiques que sociales, artistiques, littéraires, linguistiques et esthétiques, en imaginant un avenir où la figure de l'exilé dans son propre pays n'existerait plus.
Si nous sommes les « habitants moraux » du monde, notre humanité est parfois à reconquérir.
Le regard que porte Toni Morrison sur des textes d'auteurs tels que Melville, Gertrude Stein ou encore Mark Twain, mais aussi sur le monstrueux Grendel de Beowulf ou les demi-soeurs de Cendrillon, étend la réflexion aux questions du mal, du paradis et du pouvoir illégitime qui, plus que jamais, déforment la langue pour faire de toute « différence » une effrayante altérité.
Les vibrants hommages rendus à James Baldwin, à Martin Luther King, à divers peintres noirs américains ou encore aux victimes de l'attentat du 11 septembre 2001 évoquent brillamment le lien d'interdépendance qui unit toute société à ses artistes et écrivains. Parmi ces derniers, Toni Morrison est aujourd'hui de ceux qui savent le mieux rompre les silences de l'Histoire, nous dire de rêver pour mieux façonner la réalité, compter sur la mémoire pour se (re)construire et toujours garder à l'esprit qu'aucun traitement inhumain n'est parvenu à déshumaniser ses victimes. Ainsi nous fait-elle redécouvrir les sources premières de l'amour-propre, non sans affirmer sa foi dans les générations futures, en déployant un style dont la vigueur et l'audace ne cessent de nous éblouir.
Par une froide journée de janvier une femme disparaît dans l'une de ces banlieues trop propres et trop calmes que le cinéma américain nous a révélées.
Katrina, sa fille unique, croit régler avec un soin méticuleux et lucide ses comptes avec l'image d'une mère destructrice détestée en secret. mais alors pourquoi ces rêves obsédants qui hantent ses nuits ?
Une fois encore, après à suspicious river, laura kasischke écrit avec une virtuosité glaciale le roman familial de la disparition et de la faute. on pense aux meilleurs livres de joyce carol oates, on pense aussi à un scénario du type american beauty, mais qui aurait évité les pièges de l'habileté et de la technique, pour nous laisser transis dans l'angoisse et la fascination de la littérature.
1917. William Moreland, ancien détrousseur de grands chemins, n'est plus que l'ombre de lui-même. Brisé par la mort de son grand amour, Mary Boulton - celle qu'on appelait autrefois « la Veuve » - et harassé par des années de cavale, il ressurgit à la frontière du Montana, prêt à tout sacrifier pour assurer l'avenir de son fils, Jack. Le jeune orphelin vit comme un animal en cage dans une lugubre demeure, sous la férule à la fois bienveillante et inflexible de Soeur Beatrice. Du haut de ses 12 ans, Jack n'a qu'un seul désir : tel son père, fuir à son tour, et trouver refuge dans la vieille cabane familiale tapie dans les bois. Au risque de déclencher une traque folle pour le retrouver.
Avec cette étonnante saga familiale, qui tient à la fois de la tragédie faulknérienne et de La Nuit du chasseur, Gil Adamson nous entraîne dans les paysages rudes et majestueux des Rocheuses, au coeur d'un grand Ouest américain bouleversé de fond en comble à l'aube du XXe siècle. Ce vaste roman aux accents westerns, porté par une prose flamboyante et par le souffle de l'aventure, met en scène des personnages inoubliables, animés par l'énergie du désespoir et de l'amour filial.
Dans les premières années du xixe siècle, loin des guerres de napoléon, au sud-ouest de l'angleterre, une fille de pasteur anglican, qui n'est ni très riche, ni très pauvre, ni savante, ni illettrée, qui n'a aucune aventure exceptionnelle, et qui n'épousera pas un lord, entreprend singulièrement de dire en prose de fiction quelque chose d'irracontable et de jamais encore raconté : comment une jeune fille, entre toutes les contraintes de la famille, du monde et des moeurs, devient une personne entière, autonome et invincible.
Et ce faisant jane austen crée d'un seul coup une branche nouvelle, unique, étonnante, imprévisible du roman anglais, qui est surtout le roman des anglaises, avec sa prose silencieuse, énigmatique, la prose du non-dit, de la réticence, et de la retenue. ; celle qui, après elle s'avance vers sa floraison, peut-être ultime, en henry james et virginia woolf. orgueil et préjugés est le plus connu des six romans achevés de jane austen.
Son histoire, sa question, est en apparence celle d'un mariage : l'héroïne, la vive et ironique elizabeth bennett qui n'est pas riche, aimera-t-elle le héros, le riche et orgueilleux darcy ? si oui, en sera-t-elle aimée ? si oui encore, l'épousera-t-elle ? mais il apparaît clairement qu'il n'y a en fait qu'un héros qui est l'héroïne, et que c'est par elle, en elle et pour elle que tout se passe. jacques roubaud.
Ce livre présente un intérêt exceptionnel à plusieurs titres : c'est tout d'abord un témoignage unique sur la conduite des soldats soviétiques à la guerre et sur les rapports humains au sein de l'armée. C'est aussi la façon dont la population civile, le pays profond a vécu la guerre, et à cet égard, Les Cercueils de zinc est un document passionnant sur la révision morale et intellectuelle qui, au-delà du seul problème de l'Afghanistan, a déchiré le pays. C'est enfin une photographie étonnante de la mentalité russe, qui nous est offerte par une voix courageuse issue de la Perestroïka.
Cette réédition est enrichie de trois textes dans lesquels l'auteur, après un bref « récit de plus en guise d'épilogue », revient sur le procès que lui valut la parution du livre en Biélorussie. Svetlana Alexievitch fut en effet violemment accusée d'avoir déformé et falsifié les récits des soldats et de leurs mères. Après quelques extraits de presse de l'époque, le procès est présenté sous forme de « chronique » des auditions, avec les témoignages de l'accusation et des défenseurs de Svetlana Alexievitch, et enfin le jugement rendu.
Les accusations, particulièrement celles portées par les mères de soldats et par les témoins mêmes du livre, frappent par leur violence et jettent une lumière nouvelle sur le terrible chagrin de ses femmes pour qui plus s'éloigne dans le temps la guerre d'Afghanistan, plus la mort de leurs enfants engagés dans cette désastreuse entreprise semble absurde. Ces nouveaux textes révèlent à quel point ce livre a paru être une offense à tous ceux pour qui la vérité sans fard sur la guerre d'Afghanistan est un fardeau trop lourd à porter.
Kharkiv. Marioupol. Lougansk. Tchernihiv. Boutcha...
« Je prie mes lecteurs, tous ceux qui sont auprès de nous par la pensée en ce moment, de graver dans leur mémoire ces noms de villes ukrainiennes. Ces lieux nous appartiennent à nous tous. La responsabilité de leur sécurité incombe au monde entier. ».
Dès le début de la guerre en Ukraine, le 24 février 2022, l'écrivaine et photographe Evgenia Belorusets a entrepris de tenir un journal, dans lequel elle raconte le quotidien des habitants de Kiev : le sifflement des bombes, le silence des rues dévastées, la sidération, l'effroi, l'incertitude. Mais la vie, aussi, qui continue vaille que vaille à travers les gestes les plus anodins - échanger quelques mots avec un voisin, s'asseoir un moment sur un banc dans un parc, attraper au vol le miracle d'un sourire, d'un rayon de soleil, d'une minute de répit.
Avec ce document exceptionnel, dans lequel dialoguent textes et photographies, Evgenia Belorusets fait acte de résistance à sa manière intime, tentant, par les seules armes de l'art et de la littérature, de nous faire prendre la mesure exacte, à hauteur d'humanité, du drame qui se joue aujourd'hui à nos portes.
Lulu Ann Bridewell est si noire de peau à la naissance que sa mère, Sweetness, n'éprouve pour elle que dégoût. Elle élève seule la fi llette, avec dureté, répugnant à la toucher.
Mais quand Lulu Ann fait un faux témoignage contre une institutrice accusée de pédophilie, Sweetness, fi ère qu'elle ait contribué à faire incarcérer une Blanche, lui tend enfi n la main. Quinze ans plus tard, Lulu Ann est transformée. Elle s'appelle désormais « Bride », ne s'habille plus qu'en blanc et entame une brillante carrière dans l'industrie cosmétique.
Mais suite à une rupture amoureuse, puis à un banal accident de la route, le passé va bientôt la rattraper et s'ingénier à briser le radieux avenir dont elle rêvait, la rappelant aux blessures d'une enfance dont elle aura cherché en vain à se délivrer.
Dans ce roman où l'humour subtil, les accents jazz et les emprunts au registre fantastique viennent éclairer d'une lueur d'entrain et d'optimisme une intrigue tragique, Toni Morrison explore avec fi nesse les traumatismes de l'enfance, la malédiction du déterminisme racial et son infl uence profonde sur les rapports familiaux.
Vers 1680, l'Amérique n'est encore qu'aux prémices de son histoire coloniale. Parmi les utopistes du Nouveau Monde, il y a Jacob Vaark, fermier et négociant d'origine hollandaise. Sa femme Rebekka a perdu tous ses enfants, et se noie dans le chagrin. Pour alléger sa peine, Jacob accepte de prendre à son service la jeune Florens, qui vient seconder dans la maisonnée deux autres domestiques : Lina, esclave autochtone dont la tribu a été décimée par une épidémie, et Sorrow, unique rescapée d'un bateau attaqué par des pirates. Ces femmes, livrées à elles- mêmes, vont voir leur destin basculer au contact d'un homme, forgeron affranchi, qui fait soudain irruption dans leurs vies.
Neuvième roman de Toni Morrison, paru en 2009, Un don est une grande fresque historique, mêlant la tragédie intime à l'épopée de la fondation de l'Amérique, dressant au passage d'inoubliables portraits de femmes.
" un jour j'ai sorti un livre, je l'ai ouvert et c'était ça.
Je restais planté un moment, lisant et comme un homme qui a trouvé de l'or à la décharge publique. j'ai posé le livre sur la table, les phrases filaient facilement à travers les pages comme un courant. chaque ligne avait sa propre énergie et était suivie d'une semblable et la vraie substance de chaque ligne donnait sa forme à la page, une sensation de quelque chose sculptée dans le texte. voilà enfin un homme qui n'avait pas peur de l'émotion.
L'humour et la douleur mélangés avec une superbe simplicité. le début du livre était un gigantesque miracle pour moi. j'avais une carte de la bibliothèque. je sortis le livre et l'emportai dans ma chambre. je me couchai sur mon lit et le lus. et je compris bien avant de le terminer qu'il y avait là un homme qui avait changé l'écriture. le livre était ask the dust et l'auteur, john fante. il allait toute ma vie m'influencer dans mon travail.
" charles bukowski, 1979.
San Francisco, 1942. Card est un détective privé dont les affaires ne marchent pas très fort. Et pour cause : au lieu de s'occuper de la sordide histoire de cadavre volé dans laquelle l'a embarqué une femme mystérieuse (et fatale, comme il se doit), ou de trouver une nouvelle secrétaire après que la précédente a claqué la porte, Card passe son temps à rêver. En imagination, le voici qui se transporte dans le temps et l'espace à Babylone, où il devient le fin limier le plus célèbre et adulé de la cité antique.
Détournement jubilatoire des codes du polar, portrait hilarant et poignant d'un homme pour qui la vie est littéralement un songe, Un privé à Babylone est l'un des joyaux de l'oeuvre de Richard Brautigan, et sans doute l'un des romans les plus personnels de cet écrivain culte, devenu le saint patron littéraire de tous ceux qui tournent le dos au monde pour mieux le réenchanter par la fantaisie et la poésie.
Chaque nuit, pecola priait pour avoir des yeux bleus.
Elle avait onze ans et personne ne l'avait jamais remarquée. mais elle se disait que si elle avait des yeux bleus tout serait différent. elle serait si jolie que ses parents arrêteraient de se battre. que son père ne boirait plus. que son frère ne ferait plus de fugues. si seulement elle était belle. si seulement les gens la regardaient.
Quand quelqu'un entra, la regarda enfin, c'était son père et il était saoul elle faisait la vaisselle.
Il la viola sur le sol de la cuisine, partagé entre la haine et la tendresse.
Tout aurait pu être différent pourtant, si cholly avait retrouvé son père, si pauline avait eu une maison bien rangée comme elle les aimait, si pecola avait eu les yeux bleus.
L'oeil le plus bleu est le premier roman de l'auteur de beloved et jazz, prix nobel 1993. publié aux etats-unis en 1970, il reparaît en france dans une traduction nouvelle de jean guiloineau.
Au terme d'un repas, un banquier démontre à son convive que ses convictions et ses actions en matière d'anarchisme n'ont rien à envier à celles des poseurs de bombe. Il déploie ainsi les trésors d'une rhétorique insidieuse au service de sa personne et s'installe dans de provocants paradoxes. Si ce banquier anarchiste nous enchante par son esprit retors, ses raisonnements par l'absurde et une mauvaise foi réjouissante, la véritable dimension du livre, cependant, n'est pas là : il s'agit en fait d'un pamphlet incendiaire contre la société bourgeoise, ses hypocrisies et ses mensonges. C'est aussi une dénonciation du pouvoir de l'argent, qui mine de l'intérieur le bien le plus précieux de l'homme : la liberté.
Le Banquier anarchiste est l'unique oeuvre de fiction publiée du vivant de Pessoa et signée de son vrai nom. Un texte explosif, un véritable brûlot.
Un beau jour du seizième mois de l'automne, Siméon arrive dans une vallée perdue où se succèdent inlassablement deux saisons, une de pluie et une de gel bleu, et où seules les lentilles parviennent à germer. En pleine saison pourrie, cet étranger qui se déclare écrivain cherche dès lors à prendre place dans la communauté hors du temps qui y vit, vaille que vaille. étranger au milieu de ces habitants taciturnes, Siméon devra s'affronter à une hostilité grandissante. Il est le paria, l'autre absolu.
Parviendra-t-il à écrire le livre dont il a le projet ?
Depuis près de quarante ans, Les Saisons conquit un réseau souterrain de lecteurs enthousiastes, souvent prosélytes, qui n'hésitent pas à faire circuler ce livre. Une confrérie d'initiés qui partage un même univers ; ils se connaissent et se reconnaissent entre eux, un peu comme les lecteurs de Malcolm Lowry ou de Julio Cortázar. Voici pour la première fois ce « livre culte » en poche chez Christian Bourgois. Maurice Pons s'y saisit de toute la crasse humaine pour la transformer en or.
« Quand un monde est inhabitable, on le change, ou on en change. »
Vingt-cinq ans après avoir écrit un roman d'amour, un commis aux écritures revient sur ce traumatisme ancien et démarre une sorte de journal, à la recherche de ces innombrables écrivains négatifs qui emplissent de leur assourdissant silence l'histoire de l'écriture. Livres inachevés ou inachevables, succès posthumes, auteurs d'un seul livre, maniaques du pseudonyme, incapables majeurs, désespérés a priori, militants de l'ineffable ou nègres consentants... Tous ces petits-cousins de Bartleby forment une constellation d'où, à n'en pas douter, sont sortis les meilleurs, quand ils n'y sont pas tout simplement restés.
Dans ces labyrinthiques notes de bas de page destinées à commenter un texte invisible, en quête de tous ces livres qui demeurent en suspension dans la littérature mondiale, Vila-Matas montre à quel point cette crise touche à l'essentiel de tout projet d'écriture.
Est-ce un lieu ? Le nom d'un personnage cul-de-jatte ? Un cours d'eau ? Une librairie ? Un hôtel ? Un slogan politique ? Ou encore, tout simplement, un poisson ? La «truite» de Richard Brautigan est un peu tout cela, et plus encore ; métaphore aussi enchanteresse qu'incongrue d'une Amérique rêvée et réinventée de fond en comble par Brautigan à l'orée de l'âge beat, c'est surtout son chef-d'oeuvre, le livre qui lui conféra du jour au lendemain une gloire à ce jour jamais démentie.
Livre totem, qui de génération en génération aura toujours trouvé sa place sur les chevets des amoureux de la littérature la plus libre et poétique, La Pêche à la truite en Amérique, auquel répond Sucre de pastèque comme une sorte de face B plus satirique, est un émerveillement inépuisable.